A PROPOS DE LA SERVITUDE ET DE LA
MAÎTRISE…
Dans «le discours de la servitude volontaire» Étienne de La Boétie analyse les rapports maître-esclave qui régissent le monde et reposent sur la peur, la complaisance, la flagornerie et l'humiliation de soi-même. Leçon politique mais aussi éthique et morale, La Boétie nous invite à la révolte contre toute oppression, toute exploitation, toute corruption, bref contre l'armature même du pouvoir. (Traduction en français moderne par Séverine Auffret)
Mais la révolte doit être intérieure en priorité, pour pouvoir être extérieure, c'est-à-dire symbolique, significative d'une véritable conversion. Le combat doit être intérieur avant d'être extérieur: pour être sauvé il faut être sauveur; mais pour être sauveur il faut être sauvé! Et le combat ce n'est en aucun cas la guerre. C'est un combat de la paix intérieure pour la paix extérieure…
Ce qui met l'Homme en paix dans sa relation à lui, dans sa relation au monde, c'est l'Amour. Car «l'Amour est fort comme la Mort» (Cantique , 8). L'Amour a vaincu la Mort, et la vaincra toujours par l’obéissance aux deux Commandements: «Tu aimeras ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, de toute ta force.» Et, «Tu aimeras ton prochain comme toi-même».
L'obéissance à la Parole est soumission, principe d'humilité, et non servitude, car pleine de richesse de Sagesse et d'Amour: Elle est potentialité infinie et éternelle de volonté, de courage, de force, de dignité, de pleine et parfaite responsabilité c'est-à-dire capable de rétablir l'unité entre tous!
«De s'aimer cela nous rend service; et ça rend service à tous ceux qui nous entourent!» Le serviteur de Dieu est celui qui a rétabli l'unité de vie en lui et autour de lui: c'est la transformation de la dualité en unité par le retour au cœur centre ontologique.
La servitude tient à la perte de l'âme et de l'esprit pour des intérêts, des compromis égotiques, futiles et éphémères; le serviteur de Dieu, par son détachement, consacre son passage sur Terre au sens de la Vie, au sens de l'Au-delà: c’est le Chemin de la Transcendance…
La révolte n’est pas la révolution: l'une est élévation et construction; l'autre réaction violente mortifère! Les Commandements de Dieu: «Tu ne tueras point- Tu ne voleras point...»sont des garde-fous de la violence mortifère des faibles, des inhumains.
«En somme, par les gains et les faveurs qu'on reçoit des tyrans, on arrive à ce point qu'ils se trouvent presque aussi nombreux, ceux auxquels la tyrannie profite, que ceux auxquels la liberté plairait» nous dit La Boétie.
Ce qui fait que l'homme combat pour sa vie sur terre c'est le gène qu'il porte en lui de sa liberté. Sa servitude «volontaire» n'est que la résultante de la perte de sa vie intérieure plongée dans l'inconscience du monde extérieur. L'être qui se détourne de son cœur perd son âme et son esprit attirés par la séduction de l'absurdité, de l'abrutissement de son animalité qui n'a pas été intégrée, incorporée!
Nous ne tirons pas du«Discours de la servitude volontaire»une simple leçon politique, mais encore une leçon éthique,morale, comme l'appel à rejeter de l'intérieur de nous-mêmes la figure menaçante, et cruelle, et adorée, du tyran; nous dit Séverine Auffret. «Alors que le penchant naturel du peuple ignorant est d'être soupçonneux envers celui qui l'aime et confiant envers celui qui le trompe. Heureusement, certaines âmes bien nées, ne supportant pas le poids du joug de la sujétion, n'ont garde d'oublier leurs droits naturels,leurs origines, leur état premier d'hommes libres, et s'empressent de le revendiquer en toutes occasions. Ceux-là, ayant l'entendement net et l'esprit clairvoyant, ne se contentent pas, comme les ignorants, de voir ce qui est à leurs pieds sans regarder ni derrière ni devant. Ils se remémorent les choses passées pour juger le présent et prévoir l'avenir. Ce sont eux qui, ayant d'eux-mêmes la tête bien faite,l'ont affinée par l'étude et le savoir. Ceux-là quand la liberté serait entièrement perdue et bannie de ce monde, l'imaginent et la sentent en leur esprit, et la savourent éternellement.» (La Boétie).
La liberté est inconditionnelle car elle est principe essentiel à la vie, principe originel de la Vie, qui suscite depuis la chute du Ciel sur la Terre, et maintenant de la Terre en Enfer, un état de veille permanent pour sa libération. La nature intrinsèque de l'homme infinie et éternelle est d'être libre; sa tendance naturelle terrestre est d'être esclave du futile et de l'éphémère.
«Les tyrans d'hier comme d'aujourd'hui n'ont jamais eu plus de facilité à tromper la populace et ne l'ont jamais mieux asservie que lorsqu'ils s'en moquaient le plus...Le peuple a toujours ainsi fabriqué ses propres mensonges, pour y ajouter ensuite une foi stupide.» (La Boétie). Quelle condition est plus misérable que de vivre ainsi, privé de son âme, de son esprit et de son corps au nom de tout autre considération, que celle de la liberté de vivre en soi, avec soi, pour soi comme pour l'autre?
Les sentiments sont la faiblesse de l'humanité; mais l'amour de la vie en demeurera toujours sa force éternelle.
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